Guinée: retour à la table des négociations après la répression de lundi
Le régime guinéen a renoué le dialogue avec les syndicats mardi, en l'absence du président Lansana Conté, au lendemain d'une répression policière sanglante ayant fait au moins 34 morts en marge de la grève générale illimitée qui paralyse le pays depuis le 10 janvier.
Une réunion annoncée mardi en Guinée entre le couple présidentiel et l'intersyndicale à l'origine de la grève s'est finalement tenue en présence de la seule première dame Henriette Conté, qui a obtenu la reprise des négociations entre les syndicats et les "institutions républicaines".
"Nous devions voir le couple présidentiel, mais c'est juste la première dame qui nous a reçus. On ne sait pas pourquoi", a déclaré Ousmane Souaré, de l'Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), dont un autre responsable avait initialement annoncé à l'AFP une rencontre syndicats/couple présidentiel.
"On a rencontré (Mme Conté) pendant deux heures. Elle a servi de médiation pour nous demander de reprendre les négociations", a expliqué de son côté Rabiatou Sérah Diallo, secrétaire générale de la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG).
"Nous avons accepté de reprendre les discussions demain (mercredi) à 10H00 (locales et GMT) avec cinq ministres, le président de l'Assemblée nationale, des membres du bureau de l'Assemblée, du Conseil économique et social et de la Cour suprême et les responsables religieux", a précisé Mme Diallo.
La situation a été calme dans la journée de mardi dans la capitale et dans le reste du pays, à l'exception de deux manifestations dispersées sans violence à la mi-journée à Dabola (centre) et Kundara (nord-ouest).
La police guinéenne déployée dans une rue de Conakry, le 23 janvier 2007 © AFP Georges Gobet |
L'armée et la garde présidentielle avaient établi un cordon de sécurité autour du centre de la capitale, où se trouvent le Palais présidentiel et le camp militaire Samory, au sein duquel réside actuellement le chef de l'Etat.
La CNTG et l'USTG ont lancé le 10 janvier un mouvement de grève, initialement pour protester contre la corruption et l'ingérence du chef de l'Etat dans les affaires judiciaires.
Face à l'intransigeance du pouvoir, le mouvement s'est radicalisé et les manifestants exigent désormais le départ du président Conté, 72 ans, au pouvoir depuis 1984 et affaibli par la maladie.
La sévère répression qui a répondu à une vague de manifestations lundi a fait 34 morts, dont 4 enfants, et plus de 150 blessés. Cette journée fut la plus meurtrière depuis le début d'un mouvement dont le bilan atteint 44 morts.
Mardi, la communauté internationale a de nouveau dénoncé les violences, le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Alpha Oumar Konaré, condamnant "la répression des manifestations" et réclamant "une enquête indépendante".
La France a condamné "l'usage de la violence" et a exprimé mardi sa "très vive préoccupation devant le nombre élevé de victimes".
La Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (Raddho), organisation non gouvernementale basée à Dakar, a appelé de son côté la communauté internationale "à intervenir d'urgence pour arrêter le massacre".
Le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Afrique de l'ouest, Ahmedou Ould Abdallah, a par ailleurs effectué mardi une visite de quelques heures à Conakry "pour se rendre compte de la situation sur le terrain", a-t-on précisé dans son entourage.
Son retour à Dakar, où il est basé, était prévu dans la soirée.