Sans l’aval de Kabila, Gizenga ni de Kamhere : JP Bemba n’ira plus au Portugal !
De sa cachette à l’Ambassade Sud Africaine, l’homme envisageait se rendre, le
samedi 31 mars, à Lisbonne pour des soins médicaux. En dehors de sa propre
lettre d’engagement à n’entreprendre aucune action politique contre le pouvoir à
Kinshasa, le Portugal, pays hôte, attendait également celle des autorités
congolaises l’autorisant à effectuer ce déplacement. Swing serait dans le jeu
pour convaincre le Président Kabila.
En principe, c’est le samedi 31
mars dernier que l’ancien Vice-Président devait quitter Kinshasa pour Lisbonne,
au Portugal. Aux dernières nouvelles, il n’a pu effectuer ce déplacement en
raison de deux conditions préalables. En effet, bien que disposé à l’accueillir
avec sa femme et ses enfants, le pays hôte, par son Ambassadeur à Kinshasa, attendait cependant deux lettres d’engagement.
L’une, de Jean-Pierre
Bemba lui-même, introduisant expressément une demande de voyage pour des soins
au Portugal et mentionnant également qu’il n’entreprendrait aucune activité
politique contre les institutions légalement établies à l’issue des élections
libres, transparentes et démocratiques organisées en 2006 et 2007 en RD. Congo.
L’autre, celle des autorités congolaises en place, notamment du
Gouvernement Gizenga ou de Kamerhe, sollicitant l’accueil de Bemba auprès du
gouvernement Portugais. A en croire M. Alfredo Duarte Costa, premier des
citoyens portugais en RD. Congo, la lettre de M. Bemba lui est parvenue, le
jeudi 29 mars, par l’entremise de M. Swing, Représentant Spécial de Ban Ki-Moon,
Secrétaire Général des Nations Unies, à Kinshasa.
Tandis que celle des
autorités congolaises tarde à venir. Vital Kamhere, Président de l’Assemblée
Nationale, qui les représentaient à ces tractations tripartites (Bemba,
autorités congolaises et Ambassade du Portugal), aurait marqué un accord verbal.
Mais cela ne suffit pas. Le diplomate portugais l’a rappelé hier, à
juste titre, sur les antennes de la radio onusienne. « ...J’attends la deuxième
partie de l’engagement, celui des autorités congolaises », soutient-il. Tout
ceci consacrerait leur volonté à le laisser partir au Portugal. « Il y a un
accord verbal de Vital Kamhere.
Mais j’attends l’engagement écrit »,
a-t-il ajouté. Au cours d’une interview qu’il a accordée à la Radio Okapi,
l'ambassadeur Alfredo Duarte Costa fait des révélations sur ce dossier. Pour
lui, ce n’est pas l’Etat Portugais qui entretient de bonnes relations avec la
RD. Congo depuis cinq siècles qui souhaite que Bemba y aille. Par contre, ce
sont les autorités congolaises et M. Bemba qui considèrent que ce déplacement
pourrait favoriser le rétablissement de la paix et la réduction des tensions.
Ci-après, les propos de M. Alfredo Duarte Costa tels que recueillis par
la Radio Okapi, le samedi 31 mars 2007.
Radio Okapi: Monsieur Alfredo Duarte
Costa, vous êtes ambassadeur du Portugal en République Démocratique du Congo.
Depuis un certain temps, dans certains journaux et dans l’opinion, on vous
accuse vous et votre gouvernement, d’organiser la fuite du sénateur et ancien
vice-président Jean-Pierre Bemba. Qu’est-ce que vous répondez ?
Ambassadeur Alfredo Duarte Costa : En effet, on porte des accusations
très graves contre moi et contre mon gouvernement et mon pays, le Portugal. Le
Portugal et moi-même, nous faisons tout pour ne pas nous ingérer dans les
affaires intérieures de la République Démocratique du Congo. Alors, c’est avec
beaucoup de tristesse que je vois des telles accusations qui bien sûr, sont tout
à fait fausses.
R.O. : De quoi s’agit-il ? Il n’y a pas de fumée sans
feu…
ADC : Si vous me permettez, je vais raconter comment les choses se
passent. On n’avait décidé de maintenir tous ces dialogues, toutes ces
négociations secrètes, mais entre-temps, le représentant permanent d’Afrique du
Sud aux Nations unies a donné une interview à la BBC, alors, l’affaire n’est
plus confidentielle. Je me permets ainsi de vous la raconter. Le mardi, j’ai été
approché par mon collègue sud-africain, ici à l’ambassade d’Afrique du Sud. Il
m’a dit que M. Bemba a manifesté le souhait de partir au Portugal pour se faire
soigner. Moi j’ai trouvé cela normal, parce qu’il s’était cassé la jambe et
qu’il a été opéré en décembre dernier au Portugal, dans un hôpital portugais.
L’ambassadeur sud-africain m’a demandé si mon pays était prêt à accepter cette
demande. Je lui ai dit bien sûr que c’était un dossier tellement délicat et de
grande responsabilité que je ne pouvais pas répondre. J’ai dit que j’allais
consulter les autorités portugaises. J’ai parlé à mon ministre, et la position
du Portugal est très, très claire. Cette position est la suivante : nous, on ne
cherche pas à ce que M. Jean-Pierre Bemba vienne au Portugal. Mais ce sont
plutôt les autorités congolaises et M. Bemba qui pensent que le départ de ce
dernier au Portugal est de nature à faciliter la situation en RDC, qu’il est de
nature à rétablir la paix et à réduire les tensions. Le Portugal, pas comme
demandeur, mais comme pays facilitateur, est tout à fait disponible vis-à-vis
d’un pays ami. Nous sommes en relations avec le peuple congolais depuis cinq
siècles. S’il y a la requête de M. Bemba et des autorités congolaises, nous
sommes prêts à recevoir M. Bemba au Portugal. Mais naturellement avec des
conditions.
R.O. : Quelles sont ces conditions, M. l’ambassadeur ?
ADC : Notre principal souci c’est de sauvegarder nos bonnes relations
avec la RDC. Nous avons exigé plusieurs conditions. Une lettre de M. Jean-Pierre
Bemba dans laquelle il demande expressément qu’il souhaite partir au Portugal.
Et une deuxième chose aussi importante, il s’engage dans cette lettre à ne pas
avoir des activités politiques au Portugal contre les autorités légitimes en
place en République Démocratique du Congo. On a demandé de l’autre côté une
lettre aux autorités congolaises dans le sens de demander aux autorités
portugaises d’accueillir M. Jean-Pierre Bemba au Portugal. On a négocié. Je dois
dire qu’on a négocié depuis mardi avec M. Bemba et avec M. Vital Kamerhe qui
représente dans cette négociation les autorités de la République Démocratique du
Congo. On est arrivé à un accord verbal. Alors, les deux parties ont accepté les
conditions que le Portugal a posées. M. Bemba m’a fait parvenir avant-hier
(ndlr, jeudi), la lettre avec ses engagements, par le biais du Représentant
spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC, l’ambassadeur Swing. Et,
j’attends la deuxième partie de l’engagement, c’est-à-dire, l’engagement des
autorités congolaises. Il y a un accord verbal de M. Kamerhe, mais pas encore un
engagement écrit. Alors, une fois qu’on aura cet engagement, toutes les
conditions seront réunies pour que M. Bemba parte au Portugal. Mais je dois
souligner qu’en ce moment, les conditions posées par le gouvernement portugais
ne sont pas réunies, par conséquent M. Bemba ne peut pas entrer en ce moment au
Portugal. C’est très clair.
R.O. : Donc, pas de voyage au Portugal pour
le sénateur Bemba sans les engagements écrits et de Bemba et du président Kabila
?
ADC : Nous ne demandons pas que le président Kabila signe
nécessairement la lettre d’engagement du côté des autorités congolaises. Il peut
mandater par exemple le premier ministre Antoine Gizenga ou Vital Kamerhe qui
est le président de l’Assemblée nationale. Si l’une ou l’autre de ces
personnalités signe la lettre, alors les conditions seront réunies. Mais pour le
moment, je tiens à le souligner, ces conditions ne sont pas encore
réunies.