Palu – PPRD : avis de divorce
L’interpellation annoncée du Premier
Ministre ne peut se concrétiser sans l’appui des ténors de l’AMP,
explique-t-on au Parti Lumumbiste Unifié.
«C’est une
déclaration de guerre et rien d’autre ». Au Parti Lumumbiste Unifié, on
ne décolère pas. On dit surtout savoir à quoi s’en tenir depuis que,
plusieurs mois déjà, d’insinuations en ironies, l’entreprise de
fragilisation et de démolition du Premier Ministre avait commencé. « Le
Patriarche a préféré garder son calme et nous avons tous adopté un
profil bas pour donner une chance à la majorité et à notre pays »,
tonne un militant du Palu qui en a vu d’autres.
Pour lui comme
pour tant d’autres de ses camarades, la tonalité des discours de la
rentrée parlementaire, aussi bien à l’Assemblée Nationale et qu’au
Sénat, était un « signal ». Il n’en démord pas : « Un mot d’ordre doit
avoir été donné pour la mise à mort. Mais autant ils nous avaient
approchés au grand jour, autant nous aurions souhaité qu’ils opèrent de
la même manière, au lieu de recourir à des supplétifs. Le divorce est
gérable quand il est décidé de commun accord, autrement, ce sont les
enfants qui souffrent, et les tristes réalités du couple étalées au
grand jour », avertit-il.
C’est vrai que le double réquisitoire de Vital Kamerhe et Léon Kengo, samedi dernier, se voulait sans complaisance. Des analystes sont allés même jusqu’à dire que s’il ne démissionnait pas de lui-même après ce coup de semonce, c’est que Gizenga chercherait à se faire pousser dehors pour en tirer profit. La confirmation, estiment les mêmes analystes, serait l’interpellation du Premier Ministre à l’initiative du président de la commission politico-administrative et judicaiire de l’Assemblée Nationale, le MLC Delly Sessanga Hippung. Selon des sources généralement bien informées, le principe en aurait été discuté et approuvé par la conférence des présidents. Il ne resterait plus au Président de l’Assemblée Nationale que d’en obtenir le quitus…
Divorce
Premier problème donc: quel sera l’avis du Chef de l’Etat ? Peut-il
laisser faire ses troupes sans en tirer toutes les conséquences
logiques ? Et le Premier Ministre lui-même, pourrait-il accepter de se
prêter à un jeu dont il est convaincu qu’il consacrera sa mise à mort ?
Deuxième problème : quelle que soit l’opinion personnelle d’Antoine
Gizenga Fundji, on voit mal ce dernier accepter de se laisser
déshabiller, de laisser liquider tous ces mythes qui ont bâti sa
légende d’opposant farouche, d’homme intègre et de nationaliste
intransigeant. N’ayant pas d’ambition et ne cherchant pas les plaisirs
d’un exercice solitaire du pouvoir, le vieux lion pende pourrait
surprendre. Et c’est le troisième problème, en termes de conséquences
politiques d’un acte somme toute inédit.
Il ne faudra pas seulement trouver de nouveaux équilibres au sein de la majorité et se préparer à affronter une opposition reconfigurée. Il y a pire, en termes de stabilité politique d’un pays toujours à la merci de la moindre poussée de fièvre. L’Est est si loin d’avoir retrouvé sa sérénité, alors que le Centre continue, comme par le passé, à bouder. Quel sera alors le bénéfice pour une majorité qui aura réussi le tour de force de faire froncer le sourcil d’une capitale toujours aussi frondeuse, avec en prime un Bandundu de plus en plus dubitatif et un Bas-Congo qui conteste de plus en plus ouvertement ? Un cas de figure inédit, dans lequel, selon certains stratèges, le moindre mal serait paradoxalement de se retrouver avec à la fois Antoine Gizenga, Etienne Tshisekedi et Jean Pierre Bemba dans une opposition reconfigurée.
Reste les évidences. Premièrement : la confirmation de l’interpellation ne peut se faire qu’avec l’accord de la conférence des présidents. Ce qui signifierait automatiquement la consommation du divorce entre l’AMP et le Palu pour une plongée dans l’inconnue. Deuxièmement : le Palu choisira contre vents et marées et avec un bel ensemble de faire bloc autour de son chef historique. Il suffira d’observer, dans les jours qui viennent, l’évolution du discours et de la posture du Palu dans les quartiers populaires pour apprécier le temps qu’il risque bientôt de faire dans la capitale.
Ca va chauffer
Il restera, d’ici là, à répondre à certaines questions de fond. Notamment celle de savoir si l’initiative du Député Sessanga a le soutien du groupe parlementaire MLC subitement devenue une opposition responsable face à une majorité incapable de se déterminer et de gérer les ambitions de ses ténors. Dans le cas contraire, le président de la commission politico-administrative et judiciaire de l’Assemblée Nationale devra batailler pour convaincre qu’il n’a pas vocation à jouer les supplétifs d’une majorité refusant de s’assumer et d’avancer à visage découvert. On observera particulièrement, à ce sujet, l’attitude du MLC obligé, s’il n’approuve pas l’initiative, de le dire haut et fort afin d’évacuer toute ambiguïté. Un véritable dilemme cornélien pour le parti de Jean-Pierre Bemba Gombo, qui risque ainsi de donner l’impression de soutenir un Premier Ministre qu’il a toujours combattu. Ce faisant, le MLC pousserait l’AMP, en toute logique, à prendre ses responsabilités.
Autre question : en cas de divorce dans un climat aussi détestable, tout porte à croire qu’il pourrait s’ensuivre aussitôt un immense déballage. Le Phare sait par exemple que récemment, les dérapages monétaires ont fait l’objet d’échanges vifs en Conseil des ministres. Des noms ont même été cités…
Exemple aussi, le Premier Ministre et ses principaux collaborateurs ne peuvent pas ne pas savoir, après toutes les réformes qui ont été initiées, qui a fait quoi dans ce pays, qui a détourné les fonds publics, qui s’est fait du beurre dans la signature des contrats miniers. Des documents qui risquent de causer d’énormes dégâts s’ils tombent dans certaines mains. Autant dire que ça va chauffer, que ça risque de saigner. Le Phare