RDC: le processus de paix à nouveau menacé d'enlisement au Nord-Kivu
Le processus de paix au Nord-Kivu, région troublée de l'est de la République démocratique du Congo (RDC) risquait à nouveau vendredi de s'enliser après l'annonce du retrait de miliciens locaux, qui estiment avoir été écartés de postes-clés au sein des commissions de suivi.
"Nous nous retirons du processus de paix parce que nos listes (de candidats aux différents postes) n'ont pas été respectées. Ce qui vient de se passer, c'est de la tricherie", a déclaré à l'AFP Sendugu Museveni, porte-parole des Patriotes résistants congolais (Pareco), le plus important groupe Maï Maï du Nord-Kivu.
Les Pareco affirment que leurs candidats ont été écartés des postes à responsabilité au sein des commissions du programme Amani (paix, en swahili), mis en place à la suite de la signature par tous les groupes armés congolais des Nord et Sud-Kivu, le 23 janvier, d'un "acte d'engagement" pour la paix.
Ils estiment que les ordonnances présidentielle de nomination des membres des commissions, signées le 20 mars, font la part belle à leurs ennemis du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), le mouvement du chef rebelle tutsi congolais Laurent Nkunda, alors qu'eux-mêmes n'obtiennent aucun poste de coordination ou de secrétariat permanent.
Ils accusent l'abbé Apollinaire Malu Malu, coordonnateur du programme Amani et par ailleurs président de la Commission électorale indépendante (CEI), d'avoir "nommé des gens qui sont proches de lui", y compris "des membres de la CEI".
"Que ce programme réussisse ou échoue ne nous engage pas", a conclu M. Museveni.
Les ordonnances du 20 mars fixent l'organisation et le fonctionnement du programme Amani, qui prévoit notamment de veiller au cessez-le-feu signé en janvier, un désengagement progressif des troupes sur le terrain et la démobilisation des combattants.
Les Pareco et d'autres groupes Maï Maï (miliciens locaux d'auto-défense issus de différents groupes ethniques), bien que largement représentés dans les commissions, déplorent de n'avoir obtenu la direction d'aucune.
Ils s'insurgent en particulier de voir la tête de la commission Paix et Sécurité, considérée comme la plus importante, partagée entre le représentant du gouvernement, le vice-amiral Didier Etumba (coordonnateur) et le porte-parole du CNDP, René Abandi (secrétaire permanent).
"Ce qui a été fait, c'est de la moquerie. C'est un partage entre le gouvernement, qui a 50% (des postes-clé) et le CNDP, qui a 50%. Ce n'est pas ce qu'on avait planifié avec l'abbé Malu Malu", a déclaré à l'AFP Didier Bitaki, porte-parole des Maï Maï Kifuafua, un des sept groupes armés Maï Maï du Nord-Kivu (qui en compte huit, avec le CNDP).
Sans annoncer un retrait total du processus de paix, M. Bitaki a indiqué que son groupe devenait désormais "observateur et non plus acteur du programme Amani".
Le CNPD, qui n'a pas encore réagi aux nominations, n'était pas joignable vendredi après-midi.
De son côté, l'abbé Malu Malu nie toute violation de l'"acte d'engagement" et invite les groupes à faire des réclamations au sein des commissions.
"Ce jeu de retrait, ce n'est pas ça qui va nous faire avancer", a-t-il déclaré au micro de la radio Okapi, parrainée par l'ONU, rappelant l'"objectif commun" poursuivi: "la paix et la sécurité" pour les populations des Kivu, qui comptent actuellement plus d'un million de déplacés internes.
Au Nord-Kivu, le cessez-le-feu est violé presque quotidiennement par les différents groupes armés, selon l'ONU.