Procès Botethi... De nouvelles pièces retardent le verdict
‘Affaire’ député Botethi. On attendait le verdict hier vendredi, mais le tribunal militaire de garnison de Kinshasa/Ngaliema a ordonné la réouverture des débats. Et cela, dans l’intérêt des droits de la défense. En effet, certains éléments figurant dans les conclusions n’avaient pas fait l’objet d’un débat contradictoire. D’où nécessité, pour éviter de violer la loi, d’une nouvelle instruction.
Vendredi 12 septembre 2008. C’était la date fixée pour le verdict du procès qui oppose le ministère public et les parties civiles aux meurtriers présumés de l’honorable Daniel Botethi Loleke, ancien vice-président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa. Mais au nom du peuple congolais, le tribunal militaire a rendu un jugement avant dire droit.
Dans celui-ci, il a ordonné la réouverture des débats. Car dans leurs conclusions, certaines parties ont apporté des éléments dont le tribunal n’était pas saisi, ni dans la décision de renvoi, ni au cours de l’instruction. Pour rappel, les prévenus étaient poursuivis pour «association de malfaiteurs, meurtre et vente des effets militaires».
Mais dans ses plaidoiries, le capitaine magistrat Patty Sangwa, président du tribunal, a dit que la partie civile Kankonde a réclamé six millions de dollars pour la prévention de ‘tentative d’assassinat du garde du corps’. Or, le tribunal n’avait été saisi par le ministère public que pour la prévention du ‘meurtre de l’honorable Botethi’.
Pour leur part, les parties civiles Botethi ont déposé de nouvelles pièces en plein délibéré, c’est-à-dire après la clôture des débats. Et ce, à l’insu des autres parties au procès.
De son côté, la République démocratique du Congo, civilement responsable, est venue brandir la prévention de ‘désertion à l’endroit de ses préposés’. Par cet argument, elle a voulu décliner sa responsabilité pour le paiement des dommages et intérêts sollicités par les parties civiles.
L’INSTRUCTION : LE 15 SEPTEMBRE
Même le ministère public, garant de la loi, a surpris le tribunal dans son réquisitoire. Il a, en effet, évoqué l’article 22 du Code pénal Livre I afin que les lieutenants Kalonji et Mungongo soient condamnés à mort pour ‘complicité au meurtre’.
Or, tout au long des débats, le tribunal n’a jamais été saisi pour cette prévention. Ce qui est une violation de la loi, quand on sait qu’en dehors du prévenu Junior Susungu, dont l’acquittement a déjà été sollicité par l’accusation, le ministère public a réclamé la peine de mort pour tous les prévenus militaires, sans admission des circonstances atténuantes.
Dans ce procès, a souligné le président du tribunal militaire, tous les prévenus tendent à plaider non coupables, sauf Inoki Lesene. En plus, les avocats de la défense ont fondé leurs conclusions sur les débats contradictoires qui se sont déroulés pendant l’instruction.
C’est pourquoi, soucieux d’une justice équitable, le tribunal s’est basé sur certains instruments internationaux. Il a évoqué le Pacte international des droits civils et politiques, sans oublier l’article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme.
Par la bouche de son président, le tribunal a fait comprendre aux parties que, lorsque les juges requalifient les faits, ils en informent directement les parties, pour susciter le débat contradictoire.
Il faut ce débat, du moment que la partie civile Kankonde fonde ses intérêts sur la tentative de meurtre, l’Etat congolais se bornant à la prévention de désertion, alors que les parties civiles Botethi ont déposé certaines pièces à l’insu des autres. Conclusion logique : «ce sont là des démarches qui amènent le tribunal à requalifier ou disqualifier les faits. Ce qui ne peut se faire qu’au cours des débats. C’est pourquoi, le tribunal militaire, disant droit, ordonne la réouverture des débats». Voilà la décision du tribunal. L’instruction, en conséquence, «reprend le lundi 15 septembre 2008 à 9h00».
Devant réagir sur la date de la nouvelle audience, le capitaine Limbaya, auditeur militaire de garnison, a posé la question. «Il s’agit de combien de nouvelles pièces versées au dossier ? L’organe de la loi n’a versé aucune pièce, bien que nous ayons évoqué l’article 22 du Code pénal Livre I». La défense, pour sa part, a sollicité un délai raisonnable, afin de mieux examiner lesdites pièces.
En guise de conclusion, Me Théodore Mukendi de la défense a déclaré que la décision du tribunal est juste. Car, il y a eu des éléments nouveaux qui n’ont pas fait l’objet des débats. Il en est ainsi de la tentative d’assassinat soulevée par la partie civile Kankonde. Le tribunal n’était pas saisi de ces faits-là. Il peut arriver soit à disqualifier, c’est-à-dire à abandonner une qualification. Soit à la requalifier, c’est-à-dire lui donner une autre qualification que celle avancée au préalable par le ministère public.
Quant à Me Papy Niango de la partie civile Botethi, il a déclaré qu’en matière pénale, le juge cherche à faire éclater la vérité, obtenir un peu plus de lumière, pour que sa conclusion soit assise sur des bases objectives, afin de rendre un bon jugement. Me Niango poursuit : «A l’audience de ce jour, nous nous attendions tous au verdict dans l’affaire Botethi. Mais le tribunal a fait remarquer qu’après la conclusion, il s’est produit par devant lui, certains moyens nouveaux. Moyens résultant soit des conclusions des parties, ou encore des pièces produites au moment où il devait clore les débats. Ces pièces n’ayant pas fait l’objet d’un débat contradictoire, il rouvre donc les débats. Pour qu’à bâtons rompus, les parties puissent en discuter».
Vendredi 12 septembre 2008, la décision du tribunal militaire de garnison de Kinshasa/Ngaliema a fait l’unanimité. Rendez-vous, pour la suite, le lundi 15 septembre 2008 à 9h00. Le Potentiel