Contrats miniers : le gouvernement n’a pas de réponse
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La révisitation des contrats et conventions minières signés par des entreprises publiques et d’économie mixte dans le secteur des mines a du plomb dans l’ aile. On a cru que l’affaire était bouclée, après plus d’une année de relecture d’une soixantaine des contrats miniers. Erreur ! Le gouvernement donne l’impression d’ avoir perdu le contrôle d’un processus par lequel il entendait rétablir l’Etat dans ses droits là où ses intérêts seraient bradés. Hier lundi à l’Assemblée nationale, le ministre des Mines a, au nom du gouvernement, tenté de répondre aux questions de la plénière. Sans convaincre.
Voilà plus d’une année que le gouvernement patauge dans un processus de révisitation qu’il a voulu éclair pour corriger les incohérences et irrégularités dans différents contrats et conventions minières signés par des entreprises publiques et d’économie mixte dans le secteur minier.
Malgré la position clairement affichée par le gouvernement, dans son Conseil des ministres du 18 décembre 2008, l’Assemblée nationale a trouvé utile d’entendre le ministre des Mines sur de grandes questions touchant directement le secteur minier. La question orale posée par le député national, Guylain Kienge Dyashi, a été au centre de la plénière d’hier lundi à l’Assemblée nationale.
Pour le ministre des Mines, Martin Kabwelulu, il s’est agi essentiellement des questions suivantes : la révisitation des contrats miniers et les conséquences de la crise financière internationale ; la gestion de cette crise par le ministère des Mines en ce qui concerne les exploitants artisanaux ainsi que les titulaires des titres miniers et de carrières ; la fiscalité fixée par divers arrêtés interministériels au regard des cours très défavorables sur le marché international.
Au cours cet examen oral, le ministre Kabwelulu a évoqué des arguments affûtés par son cabinet pour faire adhérer la plénière à la politique minière menée par le gouvernement. Un bref aperçu du secteur minier fait par le ministre des Mines lui a permis de présenter le tableau synoptique du secteur, durement touché par la crise financière.
C’est à la question de la révisitation des contrats et conventions minières que Martin Kabwelulu était le plus attendu. En effet, le congolais entendait de ce processus le rétablissement de l’Etat dans ses droits là où ses intérêts auront été sérieusement hypothéqués. Malheureusement, une année après le déclenchement de l’opération en question, c’est-à-dire, la révisitation, l’on se trouve encore loin de cette prédiction. La révisitation n’aura accouché que d’une souris. Juste un échantillon réduit des contrats et conventions passés avec satisfaction, les autres, les plus en vue du secteur, ont été recalés, contraints à repasser un nouvel examen par la voie de la renégociation.
Que de temps perdu dans un processus initialement prévu, à son lancement le 11 juin 2007 à Kinshasa, pour juste trois mois. A ce sujet, le ministre explique les raisons de cet étirement d’échéance par la complexité des dossiers. « Deux exemples peuvent à juste titre illustrer la pratique dans le domaine et la complexité de ce dernier. Il s’agit de : le cas du Liberia, qui a mis plus d’une année pour la révisitation du seul contrat Mittal Steel ; du consultant de la Banque mondiale, Duncan and Allen, qui a mis beaucoup plus de temps avec quelques contrats Gecamines malgré les facilités mises à sa disposition », a déclaré le ministre des Mines. Et de renchérir en faisant remarquer que : « Mettre moins de temps aurait frisé simplement la complaisance et aurait représenté un danger réel face à l’importance des intérêts en présence ». L’on devait logiquement prédire une fin heureuse et définitive d’un processus qui aura accaparé toute l’attention de l’opinion tant nationale qu’internationale sur un secteur qui renaissait de ses cendres, avec la promulgation en 2002 du nouveau Code minier. Hélas !
Rien de concret n’a été déterré des profondeurs des contrats et conventions que le gouvernement avait pourtant juré de rééquilibrer. Car, à l’installation de la commission en juin 2007, les termes de référence précisaient que la commission avait pour mission de : « Examiner les contrats et leur impact sur le redressement des entreprises publiques et le développement national ; Proposer, le cas échéant, des modalités de leur révision en vue de corriger les déséquilibres constatés et les vices y rattachés ».
En a-t-il été ainsi au bout d’une année de traitement des dossiers ? Difficile de répondre par l’affirmative à cette interrogation. Car au regard des faits portés à la connaissance de l’opinion par le ministre des Mines, après son intervention à l’Assemblée nationale, la forteresse de la révisitation paraît jusqu’alors impénétrable. Le mystère demeure encore entier pour autant que le gouvernement semble avoir perdu le contrôle des manettes de commande d’un processus initié certainement dans la précipitation la plus totale pour des raisons politiciennes, sans en maitriser préalablement tous les méandres.
Conscient des inquiétudes suscitées, tant dans le chef des entreprises minières elles-mêmes que dans celui des milieux financiers internationaux, par le grand retard dans la révisitation des contrats miniers, le gouvernement n’apporte pas de réponses rassurantes aux interrogations des députés. Tout se passe comme si le processus de la révisitation ne serait plus à la portée du gouvernement. Pour preuve, voilà plus d’une année que le gouvernement n’envoie pas des signaux évidents de sa nette volonté de boucler, en toute transparence, le processus de révisitation.
La longue attente
Les inquiétudes sont d’autant plus vives lorsque le ministre des Mines reste évasif sur la question de la révisitation. En dépit de la situation de crise financière internationale qui se traduit par une paralysie du secteur minier, le ministre des Mines a dit être convaincu que « la révisitation des contrats miniers produira les effets escomptés tels qu’évoqués précédemment, car les projets miniers ont une durée de vie généralement longue ».
Sans grande conviction, il a fait savoir qu’ « après ce processus, le caractère léonin de ces contrats va disparaître et les protestations qui se sont élevées tant au pays qu’à travers le monde seront estompées grâce à la confiance rétablie entre l’Etat, les entreprises publiques et les partenaires. Ces derniers pourront à nouveau commencer à lever les fonds au niveau des marchés boursiers ».
Mais, pendant combien de temps les entreprises minières résisteront-elles à la crise ? Qu’entend faire le gouvernement pour les aider à ne pas dessécher au terme de la révisitation ? Sur quelle base argumentaire le ministre des Mines garantit-il la poursuite, sans atermoiements et prolongations intempestives, du processus de révisitation ? Autant de questions demeurées sans réponses à la question orale posée au ministre des Mines. Tout se passe comme si le secteur minier devait juste invoquer la clémence des ancêtres pour que le ciel ne lui tombe pas sur la tête. Preuve que le gouvernement est dépourvu de programme économique sur lequel il doit s’appuyer. Brouillard épais au-dessus du secteur minier.
La crainte, comme soulevée par certains députés du fait que le gouvernement négocie en position de faiblesse, c’est des poursuites judiciaires. Invitation a été lancée au Parlement de tout faire pour éviter des actions judiciaires contre l’Etat congolais. Le Potentiel