Kabila : sa vraie guerre ! Les stratèges Kanambistes ne l'avaient pas vu venir
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Le Chef de l'Etat, Joseph Kabila, est confronté, depuis son élection à la tête du pays, à une nouvelle « guerre », laquelle a pour front ses propres « Cinq chantiers » (Infrastructures, Emploi, Education, Santé, Eau et Electricité). Il lui faut la gagner, s'il tient à se représenter, tête haute, en 2011. Après trois ans de mandat, chaque Congolais et chaque Congolaise se surprennent à dresser des bilans annuels de l'action gouvernementale, laquelle se confond avec celle du président de la République.Une compatriote, députée nationale de son état et membre du bureau sortant de l'Assemblée Nationale, est sortie du bois le samedi 02 octobre dernier pour s'indigner de la transformation de la question sécuritaire de l'Est en fond de commerce politique. Une bourde ? Sans doute si l'on tient compte de l'importance que revêt la problématique de sécurisation de nos populations et du rétablissement de la paix dans chacun de nos territoires. La sortie de Brigitte Kalaba a eu pour effet de susciter une émotion très vive doublée d'indignation dans le chef de plusieurs élus et particulièrement ceux des provinces ciblées. Ernest Kyaviro qui n'a jamais gardé sa langue dans la poche l'a crié haut et fort.
Mais l'émotion passée, le moment est sans doute venu de s'interroger sur le véritable sens à donner à la sortie de Brigitte Kalaba. Les mots ont-ils dépassé sa pensée ou a-t-elle voulu exprimer des préoccupations plus globalisantes qui seraient restées mal perçues à cause de l'utilisation des formules maladroites ? De quelles assurances dispose-t-on pour penser que d'autres honorables, moins enclins à s'exposer, ne pensent pas la même chose que l'élue du Katanga mais n'ont pas le courage de parler à visage découvert ? Qu'une élue du peuple en arrive à parler publiquement, haut et fort, d'un sujet qui fâche, cela exige que l'on s'y attarde un peu, même si le Président de l'Assemblée Nationale, par la voie de la sagesse, a réussi à éteindre l'incendie et à clore l'incident.
La vérité est sur le terrain
En allant aux élections- en 2006, les Congolais avaient exprimé l'espoir de voir leur environnement socio-économique changer fondamentalement. Certes, ils n'attendaient pas des miracles du jour au lendemain mais ils avaient la conviction que le retour de la transparence dans la gestion, la bonne affectation des ressources et le respect des droits fondamentaux des citoyens allaient favoriser l'émergence d'une ère nouvelle. Trois ans sont déjà écoulés. Les Congolais de toutes les provinces scrutent l'horizon et s'interrogent sur ce qu'on a fait de leurs espoirs. Les routes demeurent au stade de voeux, les hôpitaux ont foutu le camp et l'école a cessé d'être ce haut lieu du savoir pour devenir un terrain où se déroulent des vilains tours de passe-passe sentant souvent l'odeur de l'argent. Le sentiment général est que l'essentiel des ressources de la République continue d'être englouti dans des dépenses sécuritaires.
Ainsi donc, si les « 5 chantiers de la République » commencent à affirmer leur visibilité à Kinshasa, leur impact à l'intérieur du pays demeure marginal. Des villageois à qui l'on avait annoncé une autoroute, un barrage, une borne fontaine, une école, une université, un hôpital, un stade, un marché moderne, un aéroport, un port... dans les deux à trois ans, et qui ne 'voient rien venir, sous prétexte que les guerres de l'Est consomment le gros du budget national, se sentent quelque part frustrés. Ils le sont davantage lorsqu'ils apprennent qu'en guise de primes à la guerre, ceux-là même qui ont versé le sang des millions de compatriotes, jeté des milliers d'autres sur le chemin de l'exil, détruit des bâtiments et ouvrages publics, affaibli l'autorité de l'Etat, remis en cause l'intégrité territoriale pendant des années, sont réintégrés et promus dans l'armée et la police nationale, l'administration publique, les services de sécurité, sans autre forme de procès. Des Congolais d'ailleurs sont étonnés d'apprendre qu'après le ralliement du CNDP et d'autres groupes armés, les bruits de bottes restent permanents au Nord-Kivu et au Sud-Kivu et que l'effort de guerre est loin de s'arrêter. C'est cette spirale-là de l'insécurité récurrente et de l'accroissement de la facture à payer pour la paix qui dérange.
Parler vrai
» L'interrogation de Brigitte Kalaba mérite des réponses. Comme elle, des millions des citoyens de ce pays veulent savoir si le quinquennat du Chef de l'Etat va se confiner à la seule gestion du dossier sécuritaire de l'Est, pendant que de nombreux chantiers routiers lancés à Kinshasa s'enlisent dans les prolongations. A propos de la sécurité, les populations du Bas-Congo, qui sont sous la menace permanente de l'armée angolaise à Tshela, Moanda, Songololo, Kimvula, Matadi se demandent si, dans les prévisions budgétaires gouvernementales, elles sont prises en comptent autant que leurs compatriotes de l'Est.Phénomène jusque-là spécifique à la Province Orientale, au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, les déplacés de guerre et les refoulés se rencontrent désormais par milliers dans les contrées du Bas-Congo, du Bandundu, des deux Kasaï et du Katanga frontalières de l'Angola. En clair, un plan humanitaire d'urgence s'impose, en attendant que la commission mixte congolo-angolaise clarifie les choses. Les ressortissants de différents territoires congolais en contact géo-physique avec l'Angola aimeraient aussi voir les députés discuter de leur situation sécuritaire et l'exécutif national mobiliser les moyens conséquents pour leur protection et prise en charge humanitaire.
Au regard des problèmes divers pour lesquels ils n'ont pas de réponses, des Congolais, surtout ceux des provinces, se demandent si l'après-2006 ne risque pas d'être pire que l'avant-2006, aux, plans des infrastructures avec des chantiers aux chronogrammes non respectés, de l'emploi avec la montée des chômeurs et la faillite des unités de production, de l'éducation et de la santé avec la grogne persistante des enseignants et médecins, de l'eau avec un taux de desserte très faible et de l'électricité avec ses délestages et « poches noires ».
Dans deux ans, un état des lieux exhaustif du pays sera en mesure d'être fait.
Le temps est compté à Joseph Kabila dans la « guerre » qui se développe sur le front social, sécuritaire, économique, culturel et autre. Cette guerre-là n'est pas à perdre, au risque de donner raison à ceux qui soutiennent que les 5 chantiers de la République ne seraient qu'un slogan. Le Phare