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LOSAKO
18 octobre 2010

Assassinat de Chebeya : Et revoici le commissaire adjoint Amisi Mugangu

Chebeya2_003Sous le titre «Qui a tué Floribert Chebeya en RDC ?»Le site Internet «l’express.fr» de l’hebdomadaire parisien «L’Express» publie dans son édition mise en ligne vendredi 15 octobre une enquête réalisée par le journaliste Vincent Hugeux. Celui-ci a pu établir le contact par mail avec le commissaire adjoint Amisi Mugangu. Depuis le 9 octobre, ce policier fugitif avait fait savoir sa «délivrance» à la rédaction de Congo Indépendant. Il dit avoir été arrêté et torturé au Kenya par des agents aux ordres de «Joseph Kabila». Il attendait son extradition vers Kinshasa lorsqu’un policier kenyan l’a laissé partir…

«Le meurtre de Floribert Chebeya, directeur exécutif de l’ONG La Voix des sans-voix (VSV) et figure de proue du combat pour les droits humains en République démocratique du Congo (RDC), jette une lumière crue sur les maux qui rongent l’ex-Zaïre: brutalité, opacité, impunité. Il révèle aussi les travers d’un pouvoir autiste, arrogant, miné par les luttes de clans, le primat de la force sur la loi, l’insigne faiblesse de la justice et l’emprise orwellienne de l’appareil sécuritaire - armée, police, services de renseignement. Il dévoile enfin une tenace propension à manipuler les faits comme l’opinion.» En un paragraphe, Vincent Hugeux a tracé la «fiche psychologique» du pouvoir kabiliste. Après cette entrée en matière, le journaliste français relate la mort de Floribert Chebeya et la disparition de Fidèle Bazana. 

Pour Hugeux quelques dossiers ont été au centre du duel - à mort ? -  entre le regretté militant des droits humains  et le pouvoir. Il cite dans la foulée «les mystères de la lignée Kabila : l’incertaine filiation de Joseph ou l’assassinat, en janvier 2008, de son indocile demi-soeur Aimée». Sans omettre, la dénonciation  de l’exécution, en décembre 2000, d’Anselme Masasu Nindaga, les massacres des adeptes du mouvement politico-religieux Bundu dia Kongo dans la province du Bas-Congo et la répression des «militaires rebelles» de la province de l’Equateur. Le journaliste d’évoquer la réunion du «Conseil supérieur de la défense» tenue le 5 juin à la ferme Kingakati  sous la présidence de «Joseph Kabila». Réunion  à l’issue de laquelle l’inspecteur divisionnaire en chef de la police nationale, John Numbi Banza Tambo, a été «suspendu» pour «raison d’enquête». 

numbiL’ordre de la «haute hiérarchie»

«A défaut d’accéder au dossier, poursuit-il, les avocats des familles Chebeya et Bazana apprennent l’inculpation d’une demi-douzaine de gradés de la police, dont deux en fuite.»  «Le plus capé d’entre eux : le colonel Daniel Mukalay, adjoint du général. Dans le courant de juin, un certain Amisi Mugangu, membre, à l’en croire, du commando, adresse par téléphone et par courrier électronique divers messages à une poignée d’expatriés en poste à Kinshasa, puis à un journaliste du site Congoindependant.com.» Pour mémoire, le commissaire adjoint Amisi a été formel à notre journal. Selon lui,  Floribert Chebeya a été exécuté par «étouffement». L’exécution a été ordonnée par la «haute hiérarchie». Lors d’une réunion tenue dans son bureau, le général Numbi avait transmis cet ordre au colonel Mukalay. C’était le lundi 31 mai 2010 à 10 heures. Par ailleurs, le corps de Fidèle Bazana a été immergé dans le fleuve Congo «aux environs de Kinsuka».    

«Le 8 octobre, note le journaliste de «L’Express», après un silence de plus de trois mois, Mugangu a envoyé à l’auteur de ces lignes un e-mail dans lequel il affirme avoir été arrêté et torturé au Kenya par des agents aux ordres de Kabila. Puis s’être enfui, échappant ainsi à un périlleux rapatriement, grâce à la bienveillance d’un "policier de bonne foi".» Amisi lui a répété la même version : «Nous avions reçu l’ordre d’assassiner Floribert.»  Le journaliste de poursuivre : «Maints experts jurent que l’arrêt de mort ne peut émaner que du chef de l’Etat; d’autres, tout aussi péremptoires, que John Numbi, 48 ans, naguère patron du bataillon Simba, unité d’élite de l’armée, jouit d’une assise suffisante pour prendre seul l’initiative de l’hallali. Vient ensuite la théorie du complot, qui exonère le général, relègue Chebeya au rang de victime collatérale et se décline en deux variantes. Il s’agit - version 1 - de fragiliser "Jo" Kabila et John Numbi, artisans l’un et l’autre du rapprochement amorcé avec le Rwanda de Paul Kagamé. La version 2? Joseph aurait sinon orchestré le meurtre, du moins tiré profit du drame pour réfréner les ambitions supposées du général.» Et de citer un analyste onusien qui nuance que "Kabila et Numbi partagent trop de secrets; leurs destins sont liés".

Vincent Hugeux conclut son «papier» sur l’affaire Tungulu. «Le 2 octobre, écrit-il, quatre mois jour pour jour après le martyre de Chebeya, Armand Tungulu, opposant résidant d’ordinaire en Belgique, est retrouvé mort dans un cachot de la garde présidentielle à Kinshasa. Version officielle: suicide. Trois jours auparavant, il avait été tabassé et embarqué pour une pierre jetée sur le convoi de Kabila.  Journalistes insoumis, militants de la société civile: en cinq ans, le pouvoir a inspiré ou couvert une dizaine de meurtres, souvent perpétrés dans ce pandémonium qu’est devenu l’est du pays. Asservie et corrompue, la justice congolaise épingle au mieux quelques sous-fifres. Nul doute que Kabila mise, cette fois encore, sur la veulerie de l’Occident, enclin, le temps de l’indignation passé, à se plier aux impératifs de la realpolitik. Au nom de la "stabilité régionale", des contrats miniers et - un comble - de la "consolidation de la démocratie". "Calcul voué à l’échec, tonne un diplomate.»

Le procès sur la mort de Chebeya & la disparition de Bazana

image_file_2324Par un pur hasard de calendrier, l’auditeur général de la Haute cour militaire a publié jeudi 14 octobre un communiqué indiquant que tout est fin prêt pour l’ouverture du procès relatif à l’assassinat de «Floribert». Le texte commence par un rappel des faits. «Le matin du 02 juin 2010, sur la route Matadi, au niveau du quartier Mitendi, un corps sans vie est découvert sur la banquette arrière d’une voiture Mazda 626 immatriculée KN 0282 BM. Des documents trouvés dans ses vêtements, parmi lesquels des cartes de visite, révèlent qu’il s’agit de M. Floribert Chebeya, directeur exécutif de l’ONG de défense des droits de l’homme la «Voix des sans voix » (VSV)». «A la suite de cette grave affaire, (…) le Président de la République, (…), convoque le 05 juin 2010 une réunion extraordinaire du Conseil supérieur de la défense au cours de laquelle plusieurs décisions sont prises, notamment celle consistant à prendre toutes les mesures nécessaires pour que cette affaire soit tirée au clair au plus vite et que les responsables soient sévèrement sanctionnés au regard des dispositions régissant notre Etat de droit.»

Question : quel est l’intérêt pour la justice militaire de rappeler avec un brin d’obséquiosité la réunion politico-sécuritaire présidée en son temps par «Joseph Kabila»? 

«Le même jour, poursuit le texte, (…) le ministre de la Justice et des droits humains donne au procureur général de la République «injonction d’ouvrir une information judiciaire» sur les faits.»

Question : face à un homicide, un magistrat du parquet digne de ce nom a-t-il besoin d’une injonction positive du ministre de la Justice avant d’ouvrir une enquête?

«Du 06 juin au 23 juin 2010, le Parquet général de la République mène des investigations qui le poussent à qualifier ces faits de meurtre. Les personnes suspectées à ce sujet étant justiciables des juridictions militaires, le dossier ainsi constitué est transmis pour disposition et compétence à l’auditeur général près la Haute cour militaire. A son tour, l’office de l’auditeur général procède du 24 juin au 08 octobre 2010 à l’instruction pré-juridictionnelle à travers les actes de procédures ci-après : - auditions des parties civiles ; - interrogatoires des suspects et des témoins ; - confrontations ; - perquisitions ; - descentes sur terrain ; - saisies d’objets ; - réquisitions d’information ; - réquisitions à experts. A ce jour, les éléments de preuve recueillis dans ce cadre sont suffisants pour justifier le renvoi du dossier judiciaire devant le juge afin de permettre aux suspects dûment identifiés de lui présenter leurs moyens de défense».

Question : Pourquoi l’auditorat militaire n’a jamais fait état non seulement d’inculpations mais surtout de l’identité des personnes déjà inculpées près de cinq mois après le double crime?

inconnuEt revoici Amisi Mugangu !

Le samedi 9 octobre, votre serviteur reçoit un courrier électronique. L’expéditeur s’appelle «Maike Kilo». C’est le pseudonyme qui sert de «couverture» au commissaire adjoint Amisi Mugangu. L’homme avait disparu le 26 juin dernier au moment où il tentait de pénétrer sur le territoire kenyan en provenance de l’Ouganda. Amisi avait à ses trousses tous les sbires à la mine patibulaire du «raïs». C’est le cas notamment   d’un certain Elie Lungumbu. Amisi raconte son «épopée». La rédaction de Congo Indépendant a légèrement retouché le texte au niveau de la forme et supprimé certains détails non destinés au grand public :  «Je sais que tu seras surpris de me lire. Je suis encore en vie par la grâce de Dieu. J’ai été arrêté par la police kenyane dans un cachot de la province de Eldoret à la demande du président Joseph Kabila via monsieur Elie Lungumbu qui m’a pourchassé avec son équipe venue de Kinshasa jusqu’à la frontière kenyanne de Malaba. Finalement ils m’ont appréhendé. Le message est venu de Kinshasa via l’Ambassade de la RDC au Kenya, d’obtenir mon extradition à Kinshasa sous bonne escorte.» Amisi de poursuivre : «Les policiers kenyans m’ont amené dans un cachot dans la province d’Eldoret. Le souci de monsieur Elie Lungumbu, un monsieur trapu, envoyé était de me ravir toutes les preuves que je détiendrais sur la mort de Floribert Chebeya et de son chauffeur. Malheureusement pour eux, (…), je n’avais aucun élément matériel sur moi car je savais qu’on m’a tendu un piège à la frontière.» «(…). Jeté au cachot comme je te disais, Dieu merci, Kinshasa m’a oublié, c’est seulement le 2 Octobre 2010 qu’une délégation est venue à Eldoret pour me récupérer et assurer mon extradition. La même nuit (…), j’ai pu m’échapper (…). «De grâce ne dit à personne là ou je suis. Mais tu peux dire que je suis en vie et Joseph Kabila et son équipe d’Elie Lungumbu ont échoué. Je n’ai pas un numéro de téléphone, raison pour la quelle je vous ai écris.»


Le même jour, Amisi écrit : «J’ai trouvé dans ma boîte beaucoup de message des journalistes mais j’ai pas voulu leur répondre sauf à un certain journaliste Vincent Hugeux. «Merci d’annoncer que je suis encore en vie car ça pourrait soulager beaucoup des gens. Je vous conseillerais d’indiquer clairement comment Monsieur Elie Lungumbu et deux commandos venus de Kinshasa m’ont poursuivi jusqu’à la frontière de Malaba au Kenya.»

Amisi n’est pas le seul fugitif parmi les membres du «commando» ayant participé à l’exécution de «Floribert» et à la disparition de Fidèle Bazana. Il y a également le policier Christian Ngoy, un natif du Katanga. Amisi, lui, est originaire de la province du Maniema. Ces deux hommes constituent des précieux témoins pour faire éclater la vérité sur ce qui s’est réellement passé ce mardi 1er juin 2010 au siège de l’Inspection générale de la police. Il n’est pas sans intérêt de relever que dans l’interview accordée à Congo Indépendant, Ruffin Bonsenge semble disculper le général John Numbi. Selon lui, Chebeya a été exécuté par des membres de la «Garde républicaine», autrement dit la garde personnelle de «Joseph Kabila». Qui dit vrai ? L’avenir le dira.

B.A.W

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