Quand "koko" Braeckman voit l’ombre de Bemba …en Libye
Depuis mardi 22 février, les médias internationaux font état de
la présence des «mercenaires» africains subsahariens, en Libye, venus
prêter main forte au régime vacillant du colonel Kadhafi. Dans son
édition datée mercredi 23 février, le quotidien bruxellois «Le Soir»
écrit, sous la plume de Colette Braeckman, que des ex-combattants du MLC
(Mouvement de libération du Congo) seraient soupçonnés «d’avoir repris
du service». Représentant du MLC au Benelux, Jean-Jacques Mbungani
Mbanda a publié un démenti catégorique : les anciens militaires du MLC
ne sont mêlés ni de près ni de loin dans les événements en cours en
Libye. Pour lui, la journaliste du «Soir» tente insidieusement de donner
au procureur près la Cour pénale internationale, Luis Moreno Ocampo,
des arguments selon lesquels Jean-Pierre Bemba, détenu depuis bientôt
trois ans, posséderait encore des «réseaux opérationnels».
Mercenaires africains noirs
Il ne fait plus
l’ombre d’un doute : le colonel Moammar Kadhafi a bel et bien fait appel
à des mercenaires africains noirs pour «mâter» le mouvement
insurrectionnel qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans son pays.
Certains de ces "affreux" ont été faits prisonniers et lynchés par la
population. Ceux d’entre eux qui ont eu la chance de rester en vie ne
parlent pas un mot de l’arabe dialectal local. «Ils parlent souvent
anglais ou français», rapportent des témoins cités par des agences de
presse. Dans une vidéo postée sur YouTube, un africain noir, présenté
comme étant un mercenaire, dit avoir été recruté par un des fils
Kadhafi. Selon des informations difficiles à vérifier au stade actuel de
la situation en Libye, «les recrues viendraient du Nigeria, du
Zimbabwe, du Liberia ou, le plus souvent, du Tchad et du Soudan voisin»
voire de la Mauritanie. Dans son édition datée lundi 23 février, le
quotidien pro-gouvernemental soudanais al-Intibaha assure que «des
rebelles darfouris du Mouvement pour la justice et l’égalité (Jem),
proches de Kadhafi, seraient à Tripoli.» Une information démentie par un
porte-parole de ce mouvement. Dans un dossier intitulé «Kadhafi
promet un autre Tienanmen», la journaliste Colette Braeckman
s’interroge, sous le titre «Des mercenaires issus des guerres
africaines», si les «hommes de Bemba» feraient partie de ces
mercenaires. Malgré l’usage de la forme interrogative, la journaliste
dissimule mal une légèreté certaine autant que de la mauvaise foi. En
fait, il s’agit plus de supputations malveillantes que de l’info basée
sur des éléments factuels. «Les ex-rebelles congolais, écrit-elle, sont
aujourd’hui soupçonnés d’avoir repris du service auprès de leurs anciens
alliés libyens, (…).». Qui soupçonne qui? Pas de réponse. La
déclaration a été faite par qui? Via quel support? La journaliste du
«Soir» qui sait bien manipuler ses lecteurs d’enchaîner : «…mais on se
demande comment ils ont pu quitter le territoire congolais à l’insu des
autorités. Notons que la RD Congo n’a pas frontière commune avec la
Libye. Pour aller d’un point du Congo vers ce pays, il faut traverser la
République Centrafricaine et le Tchad ou longer l’immense Soudan.
Dans
son «papier», Braeckman de rappeler que c’est le colonel Kadhafi qui
avait payé «la facture» du déploiement des troupes du MLC en
Centrafrique dirigée alors par Ange-Felix Patassé. «Les exactions
commises à Bangui par les commandos de Bemba vaudront à leur chef d’être
inculpé par la Cour pénale internationale», écrit par ailleurs la
journaliste. Celle-ci ignore-t-elle que Bemba n’a pas encore été
condamné pour les faits reprochés à ses hommes et jouit encore de ce
fait de la présomption d’innocence? De même, ignore-t-elle que le MLC
n’était pas l’unique milice présente au moment des faits à Bangui et que
l’actuel président centrafricain François Bozizé était lui-même à la
tête d’un mouvement rebelle? Que dire des forces loyalistes d’Ange
Patassé épaulées par la garde présidentielle? Les combattants de Patassé
et ceux de Bozizé consacraient-ils l’essentiel de leur temps à aider
les vieilles personnes à traverser la rue pendant que ceux de Bemba
commettaient des exactions sur les habitants de la capitale? La vérité
étant têtue, «Colette» reconnaît dans son article que Kadhafi est
intervenu en 2002 en RCA pour appuyer «Ange Felix Patassé qu’il connaît
depuis les années 70, et que les Français souhaitent remplacer par
François Bozizé.
ManipulationLes allégations
contenues de l’article du "Soir" a fait bondir le représentant du MLC au
Benelux, le docteur Jean-Jacques Mbungani Mbanda qui y voit une
"manipulation". Il soupçonne Colette Braeckman «de tenter de donner au
procureur près la CPI des arguments susceptibles d’alléguer que
Jean-Pierre Bemba, bien que détenu depuis plus de deux ans, disposerait
encore de réseaux puissants.» C’est en tous cas ce qu’il a dit au
téléphone à l’auteur de ces lignes. Dans un droit de réponse adressé au
quotidien «Le Soir» ce même mercredi 23 février, Mbungani de rappeler
la lutte armée lancée à partir de 1998 par le MLC contre le régime
dictatorial du président Laurent-Désiré Kabila. Après le Dialogue inter
congolais fin 2002 et la mise sur pied des institutions de transition en
juin 2003, «le MLC a versé le gros de ses effectifs dans les Forces
armées de la RD Congo dans le cadre du brassage de toutes les forces
armées qui opéraient sur le territoire national pendant la période des
conflits», note-t-il. Et d’ajouter : «Les derniers militaires chargés de
la garde du Sénateur Jean-Pierre Bemba ont été démantelés lors des
affrontements meurtriers du 22 et 23 mars 2007 à Kinshasa. A l’issue de
ces événements plusieurs militaires fidèles à Jean-Pierre Bemba ont été
arrêtés et transférés à la prison centrale de Makala sans jugement
d’ailleurs, certains avaient trouvé refuge auprès de la Monuc et une
infime partie avaient traversé la frontière pour regagner le
Congo-Brazza.»
Abordant la situation du président du MLC détenu
depuis le 24 mai 2008, Mbungani écrit : «Au stade actuel du procès, le
procureur a fait intervenir dix témoins dont le but essentiel est
d’établir au-delà de tout doute raisonnable la commission de viol comme
crime de guerre et crime contre l’humanité contre la population de la
RCA entre 2002 et 2003. Mais à la lumière des audiences, il appert qu’il
y’a un problème de crédibilité des témoins car certains ont des fausses
identités avec des falsifications des témoignages et des contradictions
des récits.» Le représentant du MLC de dénoncer le caractère
tendancieux de l’article incriminé lequel, selon lui, «vient jeter le
doute dans les esprits en alléguant une prétendue participation des
militaires de Jean-Pierre Bemba en Libye. Cette fausse information
pourrait avoir des commanditaires lointains qui œuvrent nuit et jour
pour noircir l’image du président national du MLC et également
influencer certaines parties prenantes au procès.» Baudouin Amba Wetshi