L'Udemo : « Nzanga Mobutu dégage »
Dans un message daté du 17 mars 2011 adressé aux «Congolaises et Congolais», l’ancien vice-Premier ministre chargé de l’Emploi, l’Udemo Mobutu Nzanga, est sorti du silence qu’il observait depuis son «renvoi» du gouvernement, vendredi 11 mars, aux termes d’une ordonnance présidentielle. Se gardant de jeter l’huile sur le feu par des propos polémistes, il s’est contenté de signaler que c’est «après réflexion et large consultation» qu’il a pris la décision personnelle de se libérer «de tout engagement» vis-à-vis de l’AMP et d’entamer une nouvelle carrière politique «au-delà de l’Udemo». Dans une interview accordée à Congo Indépendant, fin janvier dernier, l’ancien «vice-Premier» n’excluait de présenter sa candidature à l’élection présidentielle prévue en novembre prochain.
Un avenir politique «au-delà» de l’Udemo
Six jours après la publication de l’ukase présidentiel mettant fin, de manière formelle, à ses fonctions de membre du gouvernement, Mobutu Nzanga a pris acte de ce qui ressemble à un «divorce pour cause déterminé» entre lui-même et «Joseph Kabila», "l’autorité morale" de l’Alliance de la majorité présidentielle (AMP). « (…), j’ai pris la décision en ce qui me concerne, d’une part, de me libérer de tout engagement vis-à-vis de mon partenaire de l’AMP, et d’autre part, de projeter, non sans émotion, mon avenir politique au-delà de l’Udemo à qui je laisse le soin, sous la direction de son président national actuel, de prendre ses responsabilités quant aux suites». «Vous aurez compris, chers compatriotes, que je tourne une page», a-t-il ajouté.
Parti à Rome le 19 novembre 2010 afin d’assister à l’élévation de Monseigneur Laurent Monsengwo au rang de Cardinal, «Nzanga» a prolongé proprio motu son séjour à l’étranger jusqu’au vendredi 11 mars dernier, date de son retour dans la capitale congolaise. En lisant entre les lignes, l’ancien vice-Premier ministre paraît décidé à démentir que son absence prolongée procède d’un coup de tête. Bref, un acte irréfléchi. Durant ce laps de temps, il s’est livré, dit-il, à une «réflexion». Il a engagé une «large consultation» sur les relations entre l’Udemo et l’AMP autant que sur son propre avenir politique. En un mot comme en cent, le fils Mobutu ne goûtait plus l’ambiance indolente qui règne, selon lui, au sein du gouvernement du Premier ministre Adolphe Muzito. Seul problème, il attendu quatre années avant de «manifester» sa mauvaise humeur.
Il a, en sa qualité d’"autorité morale" de l’Udemo, rappelé les circonstances qui ont conduit à la conclusion d’un accord de partenariat entre son parti et l’AMP. «(…), il vous souviendra qu’en 2006, j’ai été présenté devant vous dans le cadre des présidentielles par l’Union des Démocrates Mobutiste (Udemo), parti créé à mon initiative avec pour ambition, au sortir d’une longue transition douloureuse, de restaurer l’État et d’améliorer les conditions de vie des congolaises et congolais. Tout cela autour de valeurs et acquis mobutistes, à savoir : la paix, l’unité nationale et l’intégrité territoriale.» Selon lui, c’est pour éviter la «fracture» entre l’Est et l’Ouest du pays et pour "transcender les clivages idéologiques et longtemps antagonistes", qu’il a conclu "un accord de coalition en vue de contribuer à offrir à notre peuple une première législature apaisée en cette troisième République, avec une légitimité confortable, marquée sous le sceau de la réconciliation nationale et de la reconstruction."Un soutien mou
Révoqué, Mobutu Nzanga se veut néanmoins conciliant. Aussi exhorte-t-il les membres de l’Udemo «à préserver la paix, la concorde et l’unité en son sein, en gardant jalousement à l’esprit l’essence même qui a milité en faveur de sa fondation, convaincu que le parti continuera à œuvrer dans le sens des intérêts des militants et des aspirations de notre peuple.» Il entend mener son avenir politique «au-delà de l’Udemo». Une formule pour le moins mystérieuse qui semble suggérer des dissenssions internes. Les membres de cette formation politique n’auraient-ils apprécié que modérément cet «abandon de poste» par le «Chef»? Force est de constater qu’après la révocation de Mobutu Nzanga, une seule personnalité étiquetée Udemo a manifesté sa solidarité en démissionnant de ses fonctions. Il s’agit du ministre du Commerce extérieur, Bernard Biando Sango. Qu’en est-il des parlementaires? Ici, le soutien paraît plutôt mou voire ambiguë. Dans une déclaration rendue public mardi 15 mars par la bouche du sénateur José Masikini, élu Udemo du Nord-Ubangui, les parlementaires ont trouvé des arguments pour justifier le bien-fondé de la décision présidentielle en invoquant le fait «qu’administrativement ce poste ne pouvait pas rester pendant longtemps vacant». L’ancien "vice-Premier" s’est manifestement retrouvé "seul contre tous".
Bien mieux, après concertation, les parlementaires démocrates mobutistes invitent l’AMP «à respecter» les clauses de l’accord de partenariat. C’est ainsi qu’ils s’estiment en droit de réclamer «que les postes qui reviennent à ce parti soient rétribués à ses membres jusqu’à la fin de la législature en cours.» Les Kinois diront : «Il faut bien continuer à «manger» et préparer les prochaines échéances électorales… » Questions : Mobutu Nzanga a-t-il été mis en minorité par ses camarades? Va-t-il annoncer en solo sa candidature à l’élection présidentielle? Va-t-il rejoindre le «front commun» de l’opposition en gestation? L’avenir répondra à toutes ces interrogations.
B.A.W