Nigeria: Un proche d'Obasanjo désigné candidat du parti au pouvoir

Le gouverneur de l'Etat de Katsina (nord), Umaru Yar'Adua, un proche du président Obasanjo et réputé pour son intégrité, a été investi dimanche candidat à la présidentielle de 2007 au Nigeria par le Parti démocratique du Peuple (PDP, au pouvoir), réuni en congrès.

Le président Olusegun Obasanjo, qui achève son second mandat et ne peut se représenter selon la Constitution, a estimé que M. Yar'Adua, 55 ans, serait un "successeur de valeur".

"J'exhorte les Nigérians à continuer à nous apporter leur soutien pour que nous puissions avancer sur les bases que nous avons posées", a ajouté M. Obasanjo lors du congrès du PDP.

Alors que M. Obasanjo a lancé une croisade anti-corruption, le PDP se devait de trouver un homme intègre, dans un pays considéré comme l'un des plus corrompus de la planète selon l'Ong Transparency International.

"Yar'Adua a tous les atouts: il est intègre, très humble et droit. Il a la confiance d'Obasanjo parce qu'il n'est pas corrompu", a assuré à l'AFP Mohammadu Abdullahi, un délégué de l'Etat d'origine de Yar'Adua, où la charia (loi islamique) est en vigueur depuis août 2001.

En octobre, le patron de la commission anti-corruption (EFCC), Nuhu Ribadu, avait déclaré qu'il avait ouvert des enquêtes sur 31 des 36 gouverneurs et ferait tout pour barrer la route du pouvoir aux "pourris". Réputé pour sa gestion rigoureuse, Yar'Adua avait été l'un des rares à recevoir un satisfecit.

"Je ne vous décevrai pas. Les réformes économiques vont se poursuivre et je continuerai le combat contre la corruption", a-t-il déclaré après son investiture.

On attendait un poids-lourd politique et c'est finalement un homme discret et réputé pour son intégrité qui a raflé la victoire lors de la convention du PDP qui l'a investi dimanche à l'aube par 3.024 voix sur 4.007 suffrages valides exprimés.

Selon la presse nigériane, c'est sur une quasi injonction d'Obasanjo que les favoris se sont retirés deux jours avant la tenue du congrès et que les délégués ont plébiscité un candidat sur lequel personne n'aurait parié ces derniers mois.

Pour "en arriver là", il "aura fallu", selon un éditorialiste nigérian, toute l'habileté manoeuvrière d'Obasanjo qui, avant toute chose, savait qui il ne voulait pas comme successeur, à commencer par son propre vice-président Atiku Abubakar, qui mène depuis trois ans un travail de sape contre lui.

Ce dernier a été "opportunément" suspendu du parti pour trois mois pour corruption présumée, l'empêchant ainsi de briguer l'investiture. Il compte malgré tout se présenter sous un autre bannière.

Depuis des mois, les marchandages vont bon train sur la religion et la région d'origine du futur président de ce pays mosaïque de 130 millions d'habitants.

Le Nord musulman réclame le fauteuil présidentiel, tout comme les Ibos de l'Est, l'une des plus importantes ethnies (40 millions) qui n'a pas "produit" de président depuis 40 ans, tandis que le Sud met en avant ses milliards de pétro-dollars pour briguer le siège présidentiel durant quatre ans à Aso Rock, siège de la présidence.

En choisissant Yar'Adua, Obasanjo a fait coup double: il donne droit à la revendication du Nord qui réclame une alternance automatique avec le sud, tout en sapant un peu plus les bases de son vice-président, lui aussi "musulman nordiste".

Quant au sud pétrolier d'où le pays tire 95% de ses devises, il devrait, selon plusieurs analystes, se voir octroyer la vice-présidence sur le "ticket" PDP.

M. Obasanjo, qui va prendre la tête du parti après huit ans de présidence, aura réussi, selon le politologue Gbenga Aliu, à "renvoyer l'ascenseur" à la famille Yar'Adua: le frère aîné du "candidat PDP" pour 2007 a dirigé le pays avec lui de 1976 à 1979 et avait été l'un des artisans de son élection à la présidence en 1999.