Rentrée parlementaire en RD Congo : Une session de mars très peu ordinaire à l’Assemblée nationale
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Dans un communiqué publié dimanche soir, l’Alliance de la majorité présidentielle (AMP) annonce la non-participation des députés portant son label à la séance d’ouverture de la session ordinaire de l’Assemblée nationale lundi 16 mars. La coalition des partis pro-kabiliste demande à Vital Kamerhe de démissionner de ses fonctions de président de l’Assemblée nationale à défaut, elle mettra en œuvre «les mécanismes réglementaires à l’effet d’obtenir sa déchéance». Boshab, Tshiongo et Nyabirungu seraient candidats à la succession de «Vital». Certaines voix s’élèvent pour suggérer l’organisation des «primaires» avant de départager les prétendants à la Plénière.
«Vital Kamerhe doit partir mais dans le respect des textes en vigueur et dans la dignité. C’est assez étrange de voir certains membres du gouvernement, étiquetés AMP, éprouver un plaisir malsain à inciter Joseph Kabila à humilier l’actuel président de l’assemblée nationale. Les «faucons» jouent un rôle néfaste autour de Joseph Kabila ». L’homme qui parle appartient à une formation politique alliée à l’AMP. Questions : Que reproche-t-on réellement à «Vital» ? Est-ce l’indignation manifestée par lui après l’annonce de l’entrée des troupes rwandaises dans la province du Nord Kivu ? Ou encore ses sorties médiatiques bruyantes dans l’hebdomadaire «Jeune Afrique» ainsi qu’un certain «activisme parlementaire» ayant déplu à certains ministres AMP lors des interpellations à l’Assemblée nationale ? «C’est un peu tout cela», estime un analyste.
Selon certains observateurs du «zoo politique» congolais, Kamerhe se serait comporté en opposant tout en faisant partie de la majorité. Certains membres du gouvernement lui tiendraient rigueur des «humiliations» subies par eux lors des interpellations à l’Assemblée nationale. «Kamerhe a assisté sans réagir pendant que certains députés de l’opposition s’acharnaient sur les interpellés», commente un observateur. Un analyste joint au téléphone à Kinshasa cite des noms : Jeannine Mabunda Lieko (Portefeuille) et Lambert Mende Omalanga. On cite également le ministre Pierre Lumbi des Infrastructures. C’est l’homme de fameux contrats chinois. Selon une source, l’actuel porte-parole du gouvernement serait convaincu que son interpellation à la Chambre basse est à l’origine de son départ du très juteux ministère des Hydrocarbures pour celui de la Communication. «Kamerhe a commis beaucoup d’erreurs de communication, remarque un confrère kinois. Son erreur fatale a été de laisser l’Assemblée nationale mettre sur pied des commissions chargées d’auditer des entreprises publiques y compris la Banque centrale du Congo, cette pompe à fric pour le chef de l’Etat…» Cette initiative aurait été perçue comme une «trahison».
Règlement de comptes
Il régnerait donc un climat de «règlement de comptes» au sein de l’AMP. Des noms seraient déjà cités pour occuper le futur fauteuil vacant du président du Bureau de la Chambre basse : Evariste Boshab, Tshiongo Tshibinkubula wa Ntumba et Nyabirungu Mwene Songa. Le premier est le secrétaire général du parti présidentiel, le PPRD. Les deux autres sont députés de la même formation politique. Certaines voix s’élèvent en privée pour proposer l’organisation d’une sorte des «primaires» au sein de la majorité présidentielle avant que la Plénière ne départage les prétendants. «Une telle transparence est nécessaire pour restaurer la confiance entre le futur nouveau président du Bureau et les autres membres de l’assemblée», commente un analyste.
C’est le vendredi 27 février que le PPRD invitait Vital Kamerhe, sans le citer, à se démettre de ses fonctions. Et ce, en exécution d’une décision prise dimanche 22 février par un comité politique présidé par Joseph Kabila. Après plusieurs jours passés notamment en France et aux Etats-Unis d’Amérique, le président de l’Assemblée nationale est rentré, dimanche 22 février, à Kinshasa. L’homme est resté imperturbable arguant remettre son sort à la Plénière. Et ce, au nom de la légalité. Un avis partagé par plusieurs parlementaires. C’est le cas notamment de Me Lumeya, premier vice-président du groupe des parlementaires Chrétiens démocrates (opposition). "Nous n’avons pas élu les membres des familles politiques mais plutôt des individus", a-t-il déclaré. Président de la Commission politique et administrative de l’Assemblée nationale, le MLC Delly Sessanga Hipungu ne dit pas autre chose.
En attendant de connaître le véritable vainqueur de la «lutte finale» Kabila-Kamerhe, il faut dire que le duel à mort dont l’épilogue aura peut-être lieu lundi 16 mars a commencé par opposé Vital à ce qu’il nomme le «gouvernement parallèle». Entendez : Augustin Katumba Mwanke et sa bande. Ce combat singulier s’est déroulé en plusieurs phases. Première phase : Eviction de Kamerhe du secrétariat général du PPRD et son remplacement par Evariste Boshab. Deuxième phase : Occupation du bureau du président de l’Assemblée nationale par le chef de l’Etat. C’était au mois de novembre denier. Troisième phase : Barrer la route à Vital pour le poste de Premier ministre.
En riposte, le président de l’Assemblée nationale s’est fendu une interview dans «Jeune Afrique» tirant à boulets rouges sur le «gouvernement parallèle» tout en ironisant sur les «Cinq chantiers». Un technocrate proche d’un parti allié à l’AMP de conclure : «L’AMP, ses alliés et partenaires politiques devraient tout faire pour tirer les leçons profondes de cette crise. A défaut, la démocratie congolaise en gestation sera la grande perdante».
B.A.W.