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LOSAKO
12 décembre 2006

Colette Braeckman fait du triomphalisme: La diplomatie belge a fait tourner les assiettes / Le plus jeune chef d’Etat d’Afrique

87640« On y a passé du temps, mais cela valait la peine… »Au sortir de la cérémonie d’investiture du président Kabila, Guy Verhofstadt a le succès modeste, lucide aussi : » on a fait ce qu’on a pu, posé le cadre… Mais il n’y a jamais de certitudes… » Alors que la Belgique se prépare à occuper un siège de membre non permanent au Conseil de Sécurité, le Premier Ministre se défend aussi de toute ambition internationale « me prévaloir de notre expérience en Afrique centrale pour défendre l’idée d’une organisation qui traiterait des pays en post conflit (ndlr :une suggestion parfois entendue dans les couloirs de l’ONU…) ? Cette question est vraiment prématurée : rassurez vous, on n’est pas encore parti, il y a encore du travail à faire chez nous, la coalition n’est pas morte… »

En Afrique centrale en tous cas, cette coalition a fait ses preuves, et le Premier est fier de son équipe : « tout le monde s’y est mis, les contacts se sont multipliés… Il est vrai que les acteurs congolais et nous, on se connaît, le courant passe. Moi-même, à tout moment, j’appelais l’un ou l’autre, je recevais tout le monde à Bruxelles ».

Au début de la coalition arc en ciel, en 1999, Louis Michel, initiateur de cette « diplomatie de proximité » appelait cela « faire tourner les assiettes », c’est à dire ne jamais relâcher l’attention ou l’intérêt, saisir son téléphone, sauter dans un avion, ne jamais fermer sa porte. Maintenir toutes les lignes ouvertes, avec tous les acteurs du grand Kriegspiel congolais. Les voisins européens, dont certains ont été invités dans l’avion gouvernemental en route vers Kinshasa, reconnaissent la réalité des efforts déployés : « Obstinés, les Belges », assure un diplomate français. « A chaque conseil, ils parlaient de l’Afrique centrale, rappelaient le scandale des millions de morts, soulignaient que l’avenir du continent se jouait là. Ils ont fini par persuader tout le monde, et leur politique a été avalisée par l’ensemble de l’Union, le moins impliqué n’étant pas Javier Solana, chargé de la politique extérieure.. »La nomination de Louis Michel a évidemment renforcé cette démultiplication de la politique belge grâce à l’Europe, mais les observateurs reconnaissent que le commissaire a réussi à dépasser son « syndrome congolais » pour s’intéresser aux dossiers défendus par les autres anciennes puissances coloniales « les Italiens sont incollables sur l’Ethiopie et la Somalie, les Français sont obsédés par le devenir de la Côte d’Ivoire »

Pour tenter de ramener la paix au Congo, les « jongleurs » belges se sont partagé le travail au fil des voyages et des entretiens : André Flahaut, le militant socialiste, l’homme de terrain, ne s’est pas contenté d’être le premier à vouloir s’engager dans le concret, se lançant dans la réforme de l’armée avant d’y être rejoint par d’autres partenaires. A titre personnel ou pour le compte de Di Rupo, il a entretenu des contacts avec les « partis amis » et avec leurs chefs: il a reçu Antoine Gizenga, pressenti pour être le futur Premier Ministre lors du passage de ce dernier à Bruxelles et cette fois encore, s’éclipsant de la cérémonie officielle, il est allé rencontrer Tshisekedi pour s’entretenir avec lui de l’avenir. Le leader de l’UDPS, figure historique de l’opposition, pourrait en effet se voir proposer un poste de prestige, au sein, par exemple, d’un futur comité de surveillance de la bonne gouvernance.

Karel De Gucht, après quelques impairs, fut quelquefois qualifié par les Congolais de « Père Fouettard », mais sa rude sincérité fit aussi ’effet d’une douche salutaire, d’autant plus que, même s’il soulignait la conditionnalité de l’engagement belge il ne le remit jamais en question. Et surtout, sur ses talons sinon à sa place, venait Armand De Decker, la carotte de la coopération après le bâton du rigoureux Flamand. Un De Decker courtois dans la forme, mais clair et net sur les principes, d’un enthousiasme communicatif, avec pour grand argument sa volonté d’accroître l’aide de la Belgique, passée à 109 millions d’euros, plus 25 millions à mettre en œuvre tout de suite « afin que la population congolaise voie au plus tôt les bénéfices de la démocratie ».

« Nous intéresser au Congo, rechercher une solution, c’était pour nous une responsabilité historique » assure Verhofstadt, en se réjouissant que cette fois « tout le monde s’y est mis ». Et de fait, surtout du côté francophone, le Congo suscite désormais l’intérêt des régions, des communautés, « la Wallonie doit jouer sa carte » répète José Happart, tandis que la solidarité se décline à tous les étages de la vie associative…

Cette faculté de contact sans emphase, cette multiplication des relations personnelles déroute parfois les Français. Tout d’abord parce que la Belgique a changé, s’est dédouanée du passé et débarrassée de ses ambitions post coloniales (ce que déplorent les Congolais qui constatent la pusillanimité des milieux d’affaires) mais aussi parce que la classe politique a perdu une sorte d’esprit de sérieux : « en Afrique vous vous comportez comme des républicains, et nous comme une monarchie.. » ajoute notre diplomate…

C’est pour cela peut-être qu’auréolée de son succès congolais, la Belgique jouera encore les bons offices en Afrique centrale, elle plaidera pour une prolongation de la mission des Nations unies au Congo et essaiera dans l’immédiat, de servir d’honnête courtier entre la France et le Rwanda, même si cela s’annonce difficile : « de part et d’autre, on n’est plus dans la politique, mais dans la psychologie » conclut Verhofstadt…



Le carnet de Colette Braeckman ; Le plus jeune chef d’Etat d’Afrique
A 35 ans, Joseph Kabila Kabange cumule déjà les records : il n’est pas seulement le plus jeune chef d’Etat d’Afrique mais aussi l’un des mieux élus, avec une majorité absolue de 58% des suffrages, obtenus au deuxième tour d’élections que tous les observateurs jugèrent transparentes et crédibles. Certes, d’autres présidents de la région affichent de meilleurs scores ou une plus impressionnante longévité, mais nul ne s’aviserait de les proposer comme des exemples de démocratie…L’autre record de Joseph Kabila, c’est d’avoir mené à bien une tâche que les plus lucides, voici cinq ans, jugeaient impossible : mettre fin à la guerre qui divisait le pays, obtenir le départ des troupes étrangères et, in fine, organiser des élections générales afin, comme le disait son père Laurent Désiré Kabila, rendre le pouvoir au peuple.

Pour mesurer le chemin parcouru, il suffit de se rappeler l’apparition de ce jeune homme au visage fermé, rappelé de Lubumbashi pour assister aux funérailles de son père, assassiné en janvier 2001 par son garde du corps Rachidi Kasereka. Que savait-on à l’époque de Joseph Kabila ? Celui qui était commandant en chef de l’armée de terre et qui venait d’essuyer une humiliante défaite à Pweto devant les forces rwandaises s’exprimait peu et, s’il connaissait le français, il préférait manifestement le swahili et l’anglais.


Ceux qui avaient accompagné son père lors de la première guerre du Congo, (1996-97) qui chassa Mobutu de Kinshasa après une traversée du pays entamée au Kivu, se souviennent du “ fils du chef ” : silencieux, discret, il accompagnait partout le Rwandais James Kabarebe, le commandant en chef des forces rebelles. Son père, disait-on, avait tenu à ce qu’il reçoive “ sur le tas ” une formation militaire et avait confié son fils préféré à celui qui était déjà le bras droit de Paul Kagame. Bien plus tard, on découvrira que Laurent Désiré Kabila, méfiant mais isolé, que ses alliés rwandais et ougandais laissaient dans l’ignorance du déroulement des opérations militaires et de leur traque impitoyable des réfugiés hutus, utilisait son fils comme ses yeux et ses oreilles sur le terrain. Après la victoire des troupes de l’AFDL (Alliance des forces pour la libération du Congo) “ Afande Joseph ”, le commandant Joseph qui avait assisté à la chute de Kisangani et peut-être en savait trop fut envoyé en Chine pour y parfaire sa formation militaire.


Il n’y passa que quelques mois et fut rappelé en août 1998 : l’alliance entre le Mzee (le Vieux en swahili, surnom donné à Kabila père) et ses alliés rwandais et ougandais avait éclaté. Priés de quitter le pays, les voisins trop gourmands étaient revenus à Kinshasa avec l’intention d’y confier le pouvoir à une personnalité plus docile et plus soucieuse de leurs intérêts. Dans les premiers jours d’août, alors que les “ nouveaux rebelles ”qui avaient formé le RCD Goma (Rassemblement congolais pour la démocratie) s’emparaient des deux Kivu et du Maniéma grâce à l’appui de l’armée rwandaise, Joseph fut confronté à la résistance populaire de Kinshasa, qui s’employait à débusquer des infiltrés rwandais mais aussi à traquer des citoyens ressemblant à des Tutsis. Avec She Okitundu, alors en charge des droits humains, Joseph Kabila sauva des civils, puis se lança dans la résistance à la guerre d’agression dont le Congo était victime. De 1998 jusque 2001, il fut présent sur tous les fronts, avec des succès divers et son père l’associa de près à toutes les négociations d’ordre politique, Gaborone, Lusaka.


Se sachant menacé, Laurent Désiré Kabila, mal aimé par les Occidentaux, avait confié à ses intimes que s’il lui arrivait malheur, il souhaitait que le pouvoir soit confié, dans un premier temps tout au moins, à son fils préféré Joseph, qu’il avait discrètement formé en ce sens.


C’est pour cela qu’au lendemain de l’assassinat du Mzee, le 17 janvier 2001, il n’y eut pas de vacance du pouvoir. A la suggestion du général Lwetcha, qui connaissait la famille Kabila depuis l’époque du maquis de Hewa Bora, et de Gaëtan Kakudji, son oncle du côté paternel, Joseph Kabila se vit confier la “direction de l’action gouvernementale ”.


A l’époque, les opposants à cette succession dynastique proclamèrent que “ le Congo n’était pas une monarchie ”. Ce n’est que bien plus tard qu’ils songèrent à mettre en cause la filiation de Joseph, lui prêtant des origines rwandaises ou tanzaniennes.


Il est vrai que la biographie du nouveau président congolais comporte des zones d’ombre et que lui-même, ayant gardé du maquis des habitudes de discrétion, ne s’est pas répandu en confidences. Des anciens du maquis de Hewa Bora, ouvert par Laurent Désiré Kabila dans les années 60 après la défaite des lumumbistes, se souviennent cependant de la naissance, le 4 juin 1971, de Jaynet et Joseph “ Kabange ” (ce qui signifie le deuxième des jumeaux), qui virent le jour à Mpiki, secteur de Lulenge, sur le territoire de Fizi Baraka. Dans cette zone voisine du lac Tanganyika, assiégée par les troupes de Mobutu, les maquisards vivaient à la dure, échangeant contre des armes et des vêtements le produit de leurs cultures et l’or ramassé dans les rivières. En 1977, alors que le maquis était bombardé par les Américains qui détruisaient systématiquement les champs, Kabila et les siens durent se résoudre à gagner la Tanzanie voisine. Arrivés les premiers, Maman Sifa Maanya, l’épouse légitime, originaire de la tribu des Bango Bango dans le Maniéma, et les jumeaux furent hébergés par Kazadi Nyembe, un Congolais proche du président Julius Nyerere. L’exil fut douloureux, non seulement à cause du dénuement matériel, mais aussi parce que les services de Mobutu traquaient sans relâche le plus irréductible des opposants et sa famille, obligés de se dissimuler derrière des noms d’emprunts. C’est pour cela que Joseph fréquente l’école française de Dar es Salaam en se faisant appeler “ Hippolite Kabange Mtwale ”, ce dernier patronyme étant l’un des noms d’emprunt de son père en se gardant bien de révéler à ses condisciples ses origines congolaises et sa véritable identité. Durant leurs études secondaires, les jumeaux sont discrètement suivis par le président tanzanien Nyerere et, lorsqu’ils se rendent en Ouganda le président Museveni (que Nyerere aida à conquérir le pouvoir) prit également sous sa protection les enfants de Kabila.


Ce dernier mêle toujours ses activités commerciales et son ambition de chasser Mobutu. Alors que sa sœur s’inscrit à la Faculté de journalisme de l’Université Makerere en Ouganda, Joseph suit des cours de droit et participe aux activités politiques de son père. Cette double vie, cette discrétion obligée l’obligent à se montrer taiseux, sinon introverti, à se contenter de donner l’image d’un sportif, amateur de boxe et de belles voitures.


Une enfance dans le maquis, une jeunesse dans la clandestinité, un âge adulte entamé dans la guerre puis marqué par l’assassinat du père, abattu par un garde du corops auquel il faisait toute confiance…Comment Joseph Kabila, durant ses premières années au commandes d’un pays aussi vaste, aussi compliqué, aussi divisé que le Congo ne se serait il pas montré prudent, réservé, essayant de déjouer tant les tentatives d’assassinat que les chausses trappes de ses adversaires politiques sinon de ses amis ?


Alors que les Congolais, surtout à Kinshasa et dans l’Ouest du pays, aiment que le “ chef ” aient de la faconde et de la répartie, sache se montrer ostensiblement généreux sinon démagogue et pardonnent beaucoup à celui qui réussit à les faire rire, Joseph incarne plutôt l’anti-héros. Si aujourd’hui on lui reconnaît des qualités de rassembleur, hier il apparaissait plutôt comme le plus petit commun dénominateur… Longtemps ses compatriotes se sont demandé si l’occupant du palais présidentiel n’était pas une image de synthèse, et au sortir des premières interviews, les curieux nous demandaient si les réponses avaient été soufflées via des oreillettes, sinon rédigées par la journaliste elle-même !


En réalité, s’il est économe de ses mots, Kabila observe, écoute, réfléchit puis prend son temps pour décider. La vie lui a appris à cacher son jeu, à contourner les obstacles pour mieux atteindre l’objectif final. Depuis qu’est atteint le but premier de la transition, -amener le pays aux élections-, un autre homme se révèle peu à peu : plus ouvert, plus chaleureux, très clair sur ses objectifs, le développement, la défense de la souveraineté du pays. “ On ne connaît pas encore le président Kabila ” nous disait-il lors de sa dernière interview. Gageons que dès le moment de son investiture comme président élu, le fils du combattant de l’ombre s’autorisera à lever sa visière et à surprendre…

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