International Crisis Group: La communauté internationale doit rester en RD Congo
Selon cette ONG, les consultations politiques organisées en RD Congo n’ont pas généré la stabilité escomptée. Elle recommande le maintient de la MONUC pendant au moins une année avec un mandat « élargi ».
Mardi 9 janvier, International Crisis Group (ICG) a rendu public simultanément à Bruxelles et à Naïrobi son rapport intitulé « Congo, rester engagé après les élections ». Cette organisation non gouvernementale spécialisée dans la prévention des conflits considère que la paix n’est toujours pas assurée en RD Congo malgré l’organisation des élections présidentielles, législatives et provinciales. Pour ICG, les risques de reprise des conflits sont grands. La situation demeure volatile dans l’Est du pays. Depuis quelques temps, les éléments dissidents de Laurent Nkunda se battent contre les troupes régulières de l’armée. Il en est de même en Ituri où des milices sont repris des affrontements armés. Quant à l’Ouest du pays, l’autorité de l’Etat y est faible et les risques de troubles à grande échelle sont permanents à Kinshasa et dans d’autres régions qui ne parviennent pas à accepter la défaite de Jean-Pierre Bemba aux élections présidentielles. Ce ressentiment risque de conduire à des révoltes dans les principales villes de l’Ouest du pays qui pourront conduire à une répression brutale de la part des services de sécurité. Cette probabilité est d’autant grande que l’opposition est marginalisée au parlement. Comme elle ne parvient pas à faire entendre sa voix de façon démocratique, le risque est grand qu’elle ne puisse recourir à la rue pour défendre ses positions. Un autre risque pourrait provenir de l’Alliance pour la majorité présidentielle (AMP). Les 30 coalitions de partis politiques qui composent l’AMP s’attendent à obtenir des postes ministériels. Pour les satisfaire, le gouvernement sera éléphantesque et composé de soixante ministres et vice ministres. Mais les caisses de l’Etat étant vides, il risque de se poser le problème de paiement des salaires. Cette situation peut aussi se traduire par la grève des fonctionnaires et agents de l’Etat. La corruption et la faiblesse de l’autorité de l’Etat vont continuer à déstabiliser le gouvernement. La Constitution prévoit un transfert important des responsabilités administratives, politiques et financières au niveau des provinces. Elle répartit le territoire national en 26 provinces. La RD Congo a opté pour un système très décentralisé avec une autonomie financière et une caisse de péréquation des charges. Les provinces devront garder 40% des revenus qu’elles génèrent. Il n’est pas certain que le pouvoir central accepte de bon cœur ce transfert de responsabilités, surtout dans les provinces qui seront contrôlées par l’opposition. Un engagement politique international sera nécessaire pour jeter et consolider les bases du nouveau système politique de manière à permettre un bon fonctionnement des institutions démocratiques et d’assurer une bonne compréhension de la répartition des tâches et des responsabilités de chacun et entre les différentes institutions. Deux problèmes sécuritaires demeurent. Il y a l’indiscipline de l’armée qui abuse des droits de l’homme et la possibilité non seulement de reprise des affrontements à l’Est du pays où des milices contrôlent de vastes territoires mais aussi de révolte populaire à l’Ouest du pays. Ces deux problèmes sont étroitement liés puisque la faiblesse de l’armée a permis à l’opposition armée de prospérer. Eu égard à tout cela, ICG estime que la présence de la MONUC est nécessaire avec un mandat plus large durant au moins une année. La priorité doit être donnée par les bailleurs de fonds à la création d’une armée nationale et apolitique. En attendant, ICG recommande la reconduction des effectifs actuels de 17.000 des troupes de la MONUC à l’expiration le 15 février prochain de leur mandat. La MONUC ne devrait pas être réduite à une simple mission de sécurité comme le recommandent certains bailleurs de fonds. Elle devrait continuer à agir pour la prévention des conflits nationaux, pour la stabilisation des institutions issues des élections et pour l’entraînement de l’armée nationale. Comme la mission du CIAT doit prendre fin avec l’installation du nouveau gouvernement, ICG plaide pour la poursuite de son rôle sous une autre forme suite aux réticences du président Kabila et de certains bailleurs de fonds. Le CIAT pourrait prendre la forme d’un « forum politique international » dont le rôle serait de conseiller et d’appuyer le gouvernement pour la prévention des conflits nationaux et régionaux. Cette structure pourrait comprendre outre les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité, l’Angola, la Belgique et la République sud-africaine. Une autre structure plus importante pourrait être créée séparément et serait consacrée à la coordination de l’aide humanitaire et de développement.