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LOSAKO
2 mars 2007

Congo-Kinshasa: Après Kahemba, Mayimbi vidé de sa population...

milice_armee_ituri_dgL'alerte a été lancée par des voyageurs en provenance de Tshikapa, la célèbre ville diamantifère du Kasaï Occidental, riche en diamants de joaillerie et qui a récemment défrayé la chronique avec l'invasion - c'est le mot - d'un nouveau type de conquistadors expatriés détenant le fameux parchemin du Cadastre Minier, comme d'autres détiendraient un passeport ou un sésame, pour l'accès au Palais des Mille et Une Nuits.

Sur le Kasaï comme sur la Tshikapa, sur la Lovo comme sur la Longotshimo, à Kamako comme à Kabemba, à Mayi Munene comme à Ntambwa Kabongo, ces nouveaux conquistadors ont chassé de leurs terres comme de leurs champs, de leurs huttes comme de leurs campements les populations et exploitants artisanaux impuissants devant le déploiement des machines de plus en plus sophistiqués chargées de fouiller le ventre de la terre, et des moyens de télédétection satellitaire de plus en plus pointus pour cibler les gisements les plus juteux.

Des images bouleversantes sont encore présentes dans les esprits. Avec des femmes et des enfants chassés des rives de la Tshikapa ou du Kasaï , des " plongeurs " traqués, des creuseurs arrêtés et fouettés par des forces de l'ordre au service des explorateurs ultramontains.

Des noms ont même été cités, parfois à tort et surtout sans preuves. Parmi lesquels des personnalités politiques étrangères dont certaines étaient liées à la gestion de la transition post Sun City. Mais la réalité est parfois plus cruelle et plus terre à terre : des sociétés ayant acquis des concessions minières croient avoir acheté tout le Congo et la dignité de sa population avec.

Après Kahemba, Mayimbi est un atome dans l'infini. Un village sorti de la terre depuis la fin des années 1980 grâce au génie aventureux des exploitants artisanaux du diamant, des creuseurs et des négociants qui y ont trouvé gîte et établi commerce. Des activités semi industrielles d'exploitation avaient suivi la voie, multipliant en l'espace de quelques années le parc démographique du site.

Pour ceux qui connaissent la géographie de la région, Mayimbi est à environ 130 kilomètres, à vol d'oiseau, de la ville de Tshikapa. Il est pratiquement situé sur la rivière Kasaï, à quelques encablures, en amont, du chef-lieu du secteur Kabambaie, sur la route qui conduit à Ndjoku-Punda, ex-Charleville.

Ce qui vaut cette soudaine célébrité à ce village perdu, c'est le drame que vivent les habitants - autochtones, creuseurs, exploitants artisanaux et semi industriels, négociants - chassés depuis la semaine dernière par de nouveaux exploitants expatriés appuyés par des forces de l'ordre et des chiens policiers.

Mbelenge et Mbendayi aussi

Mayimbi n'est pas seul à vivre le drame de l'évacuation des populations et de la délocalisation des activités d'exploitation artisanale du diamant. Selon des sources interrogées par Le Phare, le village de Mbelenge, à 5 kilomètres de Ndjoku-Punda, et Mbendayi, à 35 kilomètres de Tshikapa, dans la localité de Kabuankoyi, sont également sur la liste. La pression, précise-t-on de même source, est exercée par les sociétés BBF pour Mbelenge et AMB pour Mbendayi, nouvelles concessionnaires des sites. Ces sociétés disposeraient d'engins lourds pour une exploitation aussi rapide qu'intensive, à l'instar des bulldozers, des tracteurs et des excavateurs, sans parler des dragues industrielles et des moyens de télédétection par satellite.

On parle, par ailleurs, des sommes d'argent et des cadeaux en nature, comme des motos, offerts à certains chefs locaux pour faciliter l'opération d'évacuation. Il en est de même de l'utilisation des forces de l'ordre et des chiens policiers qui terrorisent la population. Au total, ce sont des pleurs et des grincements de dents qui sont perçus du côté de la population subitement déracinée, sans aucune compensation ni indemnisation, de son milieu traditionnel de vie.

Le gouvernement doit rassurer

L'affaire est pour le moins embarrassante, commente-t-on, dans la mesure où ce drame qui pouvait passer inaperçu au regard de la taille infinitésimale de ces villages perdus dans la forêt tropicale kasaïenne, survient quelques jours après la démonstration de force de l'armée angolaise sur la frontière sud-ouest de la RDC, plus précisément dans le territoire de Kahemba. L'utilisation des forces de l'ordre, le déracinement des populations ainsi que l'aggravation du chômage posent par ailleurs un véritable problème de conscience face à un Etat généralement démissionnaire.

Dans la meilleure des hypothèses donc, nous serions une nouvelle fois devant un cas avéré de l'impuissance traditionnelle de l'Etat congolais. Au pire, nous nous trouverions devant un scénario de non assistance des populations en danger face à des puissances économiques et financières disposant en outre de l'appui de la puissance publique.

La preuve en est fournie par l'utilisation abusive des forces de l'ordre, de l'administration locale et de la menace pour réussir l'opération d'évacuation, là où la pédagogie est généralement recommandée. Reste que, dans le cas de Kahemba comme dans celui des trois villages de Tshikapa, la manière n'y est pas. Bien au contraire, le gouvernement aurait été bien inspiré d'affirmer son autorité. Mais aussi et surtout de dire la vérité aux Congolais et de défendre les intérêts de la population dans un mélodrame qui lui laisse malheureusement, à chaque épisode, le désagréable sentiment qu'elle est, reste et demeure le dindon de la grande farce.

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